vendredi 2 avril 2010

Atomisation de l'écologie gouvernementale, du Grenelle et de Hulot

Le projet de taxe carbone, après s'être fait retoquer par le Conseil consitutionnel, a donc finalement été retiré depuis que le gouvernement a compris qu'il ne s'en sortirait pas sans taxer ses copains industriels. Soupirs et lamentations de Chantal Jouanno... mais pas au point de démissionner dudit gouvernement.

Alors que Sarkozy déclare au Salon de l'Agriculture que l'environnement ça commence à bien faire, l'aval est donné au projet de terminal charbonnier de Cherbourg, la commission d'enquête parlementaire sur les éoliennes cache à grand peine ses orientations pro-nucléaires, et le pseudo débat public autour de l'EPR de Penly s'ouvre dans l'hypocrisie la plus totale.

La CRE autorise l'augmentation des tarifs du gaz par GDF-Suez, Borloo fait cadeau d'une année de concessions aux sociétés privées d'autoroute, et Barroso lance la patate OGM...

Le tout, sur fond d'attaque des climato-sceptiques, sans doute ragaillardis par le succès de leur fronde contre le GIEC, à grand coups d'insinuations frauduleuses d'Allègre (vive l'écologie productive !) un temps pressenti pour devenir ministre de Sarkozy et toujours courtisé par les médias, ce qui reste pour moi un des grands mystères de notre époque... Visiblement, je ne suis pas la seule ;)

Sur ce, la fondation Hulot annonce qu'elle se retire du processus du Grenelle, je vais y revenir.

Mais avant, voici, à partir d'une note réalisée avec Mathieu Agostini du secteur écologie politique du PG, quelques éléments sur le Grenelle de l'environnement et la manière dont il a été sabordé par le gouvernement.

Une bonne intention pourquoi pas au départ, cette idée de rassembler la société civile pour élaborer un projet commun. Mais le ver était dans le fruit, et la dynamique viciée dès l’annonce de Sarkozy de sortir le nucléaire du débat avant même le démarrage du Grenelle. Depuis, la droite et la gauche productiviste jouent le jeu des climato-sceptiques en poursuivant les projets grenello-incompatibles

Les parlementaires de droite et les lobbies industriels ont poursuivi le travail de sape du Grenelle par leurs amendements : baisse du niveau de performance énergétique exigée pour les bâtiments au profit du chauffage électrique et du nucléaire (amendement Ollier), affaiblissement de la taxe poids lourd, amendements de la commission des affaires économiques et sociales favorables à l’incinération quand l’idée de départ est la diminution des déchets à la source.

Et depuis, la droite n’a cessé de saborder le Grenelle... La crise a eu bon dos encore une fois en permettant au gouvernement, le Grenelle à peine ratifié, de lancer son plan de relance de la croissance : constructions de nouvelles autoroutes, de nouvelles lignes à grande vitesse, assouplissement des règles sur les Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE) permettant à des industries polluantes de s’implanter sans passer par le conseil municipal...

Déjà en juillet 2009, voici ce que nous écrivions à ce sujet avec Mathieu dans l'hebdo du PG "A Gauche"


La loi de modernisation économique (LME) en a rajouté une couche avec l’assouplissement des règles d’installation des supermarchés en périphérie des villes... et donc la multiplication des déplacements domicile-courses.

Il est intéressant par ailleurs de noter que cette loi est une conséquence de la transposition de la directive services, que la France a mise en place en catimini, sans loi cadre de transposition, contrairement à tous les autres pays - sans exception !

Et pourtant, feignent de s'étonner certains, Sarkozy avait signé le pacte Hulot... Aaaaah oui, mais il faut quand même dire que le pacte Hulot, en restant en surface du sujet, permettait à la droite même la plus radicale d’y souscrire et d’en faire un affichage de façade ! On en voit aujourd’hui les conséquences.

Mais depuis, les masques tombent, et les choses bougent - un peu. Hulot, dans son dernier film "lL syndrôme du titanic", commence à mettre en cause le système, la consommation matérielle dans les pays les plus riches et un ordre social devenu fou... et ses récentes déclarations vont de plus en plus dans le sens d'une critique du libéralisme. Voir à ce sujet l'édito d'Hervé Kempf, court et percutant.

Dans sa lettre envoyée le 29 mars aux signataires du Pacte Hulot, la Directrice Générale de la Fondation Nicolas Hulot appelle ainsi à « changer de modèle économique », explique que « dans ce gouvernement comme dans d'autres partis politiques, la conversion à l'écologie n'est trop souvent qu'opportuniste. Cela crée des dégâts importants. Aujourd'hui, les signaux envoyés risquent de briser net l'élan du changement ». Et en appelle à réfléchir avec tous les acteurs, citoyens et politiques, à une nouvelle étape et à discuter des raisons de l’échec et de la façon de poursuivre. Encore un petit effort... Notamment sur la taxe carbone, puisque c'est son abandon qui a provoqué l'ire de Hulot.

Cette taxe était injuste socialement, portant sur les comportements contraints des ménages pauvres dans des proportions inacceptables. Ce n’est pas un choix de vivre dans un logement qui est une passoire ou de rouler avec une voiture qui a plus de 10 ans quand on vit en zone rurale sans transports en commun ! Et que dire de son efficacité, quand les entreprises en étaient exonérées alors qu’elles sont les plus grands pollueurs, responsables de la majorité des émissions ? Sous prétexte qu'elles sont déjà soumises aux quotas de CO2 du du marché carbone, celui-là même qui voit aujourd’hui apparaître les mêmes produits dérivés responsables de la crise financière, la « bourse » du carbone...

Alors non à cette taxe carbone, mais oui à une autre fiscalité, écologique et sociale, comme décrite dans notre proposition de loi, déposée à l’Assemblée nationale en novembre 2009. C’est toute une fiscalité qui est à revoir : Revenu maximum autorisé (RMA), abrogations des niches fiscales anti-écologiques et taxes ciblées.


« L’énergie la moins chère et la moins polluante reste celle que l’on ne consomme pas ». C’est bien en produisant d’abord des économies d’énergie (isolation des bâtiments par exemple) et de l’efficacité énergétique (de ce qui en consomme) que l’on sort progressivement du nucléaire et du carbone (c’est le scénario Négawatt). Nous avons les connaissances, les ingénieurs et les ouvriers en France capables de développer les technologies et de mettre en place un tel plan. Reste à le mettre en œuvre car c’est là que se trouvent les sources d’emplois durables, c'est tout le principe de la planification écologique que nous défendons au PG, avec la mise en place d'un pôle public de l’énergie : EDF-GDF à 100% public et nationalisation de TOTAL.

... Osons !

Et en prime, une petite chronologie savoureuse du Grenelle par le réseau Sortir du Nucléaire...

Haut de page