mardi 8 mars 2011

Accords de coopération : n'oublions pas qu'il y a du Sud au Nord !

Lors de la dernière assemblée plénière à la Région Rhône Alpes, nous avons voté des accords cadres de coopération avec l'Argentine et le Mali.

La Région s’efforce de tisser et de maintenir un lien fort avec nos partenaires institutionnels sur les cinq continents. Et il est vrai que, dans le principe, ces engagements s’appuient sur des valeurs essentielles et partagées au sein de la majorité, traduites par exemple dans notre soutien récent aux Objectifs du Millénaire pour le Développement. OMD que l’on peut d’ailleurs retrouver avec plaisir dans la convention de coopération avec la Région de Tombouctou. Mais il n’en reste pas moins que certaines orientations prises dans le cadre de notre politique en la matière - et les conventions avec les provinces d’Argentine soumises au vote en témoignent - nous imposent de rester particulièrement vigilants quant aux domaines d’actions qui en découlent.

En effet, force est de constater que la tentation de cloisonner le développement à la seule sphère économique, travers que nous dénonçons régulièrement pour notre Région, ne peut pas plus être le modèle promu à l’international, et moins encore peut-être en Amérique Latine où les alternatives foisonnent et dont nous aurions bien tort de ne pas nous inspirer, plutôt que d’exporter par exemple le concept de pôle de compétitivité dans la province de Buenos Aires ou encore de faire valoir l’appétit grandissant des sociétés rhônalpines pour les marchés argentins, alimenté bien sûr par ERAI !

Est-ce bien cela notre conception de la « coopération » ? N’avons nous pour seul horizon que de la laisser rimer avec « commerce » et « mondialisation » ? Ainsi aurions nous préféré voir ces nouvelles coopérations s’appuyer par exemple sur des expériences d’économie sociale et solidaire, sur les monnaies solidaires, les SEL déjà bien implantés en Amérique Latine. De même en matière d’agriculture aurions nous souhaité avoir la garantie que notre coopération favorise une production vivrière et la qualité plutôt que la quantité et l’export.

Une fois ces précisions, essentielles, apportées sur les limites de notre politique régionale en matière de coopération internationale, notons que les conventions, plus précisément l’Article 4, avec les provinces de Buenos Aires et Mendoza précisent les domaines dans lesquelles « porteront » et non « porteraient » comme écrit dans la délibération, les actions de coopération, sans y faire référence au pôles de compétitivité. Tant mieux, mais pourquoi cette différence ?... Nous voulons croire que le champ des possibles reste donc ouvert, un mal pour un bien en quelque sorte... Et nous voulons croire en notre capacité, collectivement, à bâtir à partir de ces accords cadres et de ceux qui viendront une politique de coopération internationale qui prenne en compte les éléments que j’ai évoquée pour les relations Nord/Sud comme pour les relations Nord/Nord. En clair, le développement économique n’est pas un mal en soi, pour peu qu’il s’intègre dans une politique au service de l’intérêt général, qu’il soit coordonné avec le progrès social et les enjeux environnementaux : la priorité est-elle bien à la recherche de nouveaux débouchés pour les entreprises rhônalpines dans la province de Buenos Aires ?

Je tiens enfin à en profiter pour rappeler ici qu’il y a du Nord au Sud, et du Sud au Nord : des pauvres dans des pays « riches », et des oligarques aussi dans les pays pauvres. Les priorités en matière de développement et de social que nous nous fixons pour le Mali, nous pouvons nous les fixer pour l’Argentine. Près d'un tiers des argentins vivent sous le seuil de pauvreté national, plus de 4 millions n’ont pas accès aux ressources matérielles basiques comme la nourriture, les vêtements, un logement, etc. Il y a là aussi, comme partout hélas, même chez nous, des progrès à faire sur les OMD...

Nous continuerons donc à agir pour une refonte de notre approche en matière de coopération internationale, allant dans le sens de la justice sociale, de la solidarité Nord-Sud et de la reconnaissance de la dette écologique.

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