vendredi 15 avril 2011

Yasuni ITT : ça y est ! En route vers le buen vivir...

Après plus de quatre mois d'argumentation et de travail militant au sein de la Région, Rhône Alpes a enfin voté les 150.000 euros pour le fonds Yasuni ITT :)

Dernières nouvelles également : Ivonne Baki, déléguée du gouvernement équatorien pour le projet Yasuni ITT, sera prochainement en France, une réunion pour la création de l'association nationale Viva Yasuni aura lieu à cette occasion, je vous tiens au courant...

Communiqué du groupe Front de Gauche à la Région

Le Groupe Front de Gauche du Conseil Régional Rhône-Alpes voit son engagement récompensé.
Il a en effet fait adopter un amendement en faveur du projet YASUNI-ITT à l'occasion du débat budgétaire de décembre dernier, engagement que le Conseil Régional Rhône- Alpes confirme aujourd'hui en adoptant une délibération par laquelle il abonde à hauteur de 150 000€ le fond financier destiné à recueillir l'argent versé par la communauté internationale. De plus, il consacrera 100 000€ aux projets de développement des peuples autochtones d'Équateur.

El Grupo Frente de Izquierda del Consejo Regional de Rhône-Alpes ve su compromiso recompensado.
En efecto, ha adoptado una enmienda en favor del proyecto YASUNI-ITT durante un debate presupuestario en el ultimo mes de diciembre, compromiso que el Consejo Regional de Rhône-Alpes confirma hoy adoptando una deliberación en la que aumenta de 150 000€ el fondo destinado a recoger el dinero otorgado por la comunidad internacional. Además, dedicará 100 000€ a los proyectos de desarrollo de los pueblos autóctonos de Ecuador.

Et voici, en attendant la vidéo, le texte de mon intervention à ce sujet en plénière le 8 avril dernier.

En route vers le buen vivir ! Corinne Morel Darleux

EN ROUTE VERS LE BUEN VIVIR !

Nous avons, depuis le début de cette nouvelle mandature et, me semble-t-il, depuis la mandature précédente, fait part d’une volonté forte pour cette Région Rhône-Alpes d’en faire une éco-région. Nous avons pris ensemble, déjà, un certain nombre d’engagements sur le climat, sur l’énergie, sur l’environnement, sur les solidarités internationales, sur les objectifs du Millénaire pour le Développement.

Aujourd’hui, nous sommes en passe de prendre un engagement concret, peu coûteux mais dont les enjeux dépassent de loin le seul cadre d’une coopération entre deux pays.

Le groupe Front de Gauche se réjouit de participer à la concrétisation notre engagement dans une expérience de transformation sociale et écologique innovante. Cette initiative a été portée, à l’origine, par l’Équateur. Elle s’appelle Yasuni-ITT, du nom du parc dans laquelle elle prend place. Ce parc est une réserve naturelle d’une biodiversité absolument unique sur la planète. Il abrite également un certain nombre de communautés indigènes dont certaines vivent en isolement volontaire. Mais c’est aussi un parc, comme les territoires qui le borde, qui recèle d’importantes réserves de pétrole.

Aujourd’hui, le gouvernement équatorien et la communauté internationale font le pari de prendre en compte cette biodiversité et ce parc Yasuni-ITT, au nom de l’intérêt général, comme un bien commun de l’humanité. À ce titre, le gouvernement équatorien qui, pourtant, dépend en grande partie de l’exploitation du pétrole pour ses propres ressources et ses propres recettes décide d’en faire l’affaire de tous et décide de renoncer à exploiter ce gisement. N’oublions pas que ce faisant, l’ambassadeur Equatorien l’a d’ailleurs rappelé lors de sa venue au Conseil Régional le 10 Mars dernier, l’Equateur est le pays faisant de loin le plus important effort financier dans ce projet. Nous sommes donc loin d’une simple levée de fond de l’Equateur pour se développer. L’effort est collectif, l’engagement est commun et partagé.

Plus précisément, il demande l’aide de la communauté internationale, en abondant à la hauteur de la moitié des profits qui auraient été réalisés en procédant à l’extraction de ces réserves de pétrole. Cette initiative permettrait d’éviter l’émission de 410 millions de tonnes de CO2. Voilà qui doit faire réfléchir par rapport aux nombreuses initiatives déjà prises par la Région.

Pour assurer des garanties internationales, l’Équateur a donc signé, le 3 août dernier, un fonds financier, un fidéicommis, qui est aujourd’hui administré par le PNUD, donc sous l’égide de l’ONU. Voilà qui apporte des garanties sur l’utilisation du fonds. De plus ce gage de stabilité, visant à échapper aux aléas politiques et la vision à long terme qu’il procure, face au court-termisme du tout marchand, l’impose indiscutablement comme un bien commun de l’humanité.

C’est une avancée capitale par rapport aux accords internationaux qui ont pu jusqu’ici voir le jour. Le projet YASUNI ITT se veut en cela une alternative aux échecs successifs des sommets sur le climat.

Le cas de l’Equateur nous révèle à cette occasion que le développement économique par le pétrole favorise en réalité le développement de la pauvreté. Cela a fait l’objet de nombreuses études qui parlent de la « malédiction de l’abondance ». Ce modèle empêche la diversification des activités, le développement endogène et crée peu d’emploi. Nous pouvons ainsi constater statistiquement que l’exploitation pétrolière est inversement proportionnelle au développement de l’Equateur.

C’est sur la base de ces constats que le peuple Equatorien a exprimé sa volonté, au cours de son processus de constituante, d’aller vers un nouveau modèle de développement, vers une société post pétrolière basé sur la bio connaissance et l’anti-extractivisme. Il nous faut mesurer l’espoir et la force transformatrice qui émerge de la révolution citoyenne du peuple équatorien, et vous savez à quel point nous sommes attachés à cela. Je veux ici vous montrer à quel point le projet Yasuni ITT n’est pas une fin en soit, mais la partie immergée de l’iceberg d’une société qui se donne les moyens de construire et d’assurer son avenir en se libérant des diktats du libéralisme et du productivisme.

La constitutionnalisation du « bien vivre » (c’est-à-dire la reconnaissance du droit à l’eau, à l’énergie, à la biodiversité…) découle donc de ce travail citoyen et s’inscrit en faux par rapport au « bien être » matériel, fer de lance de la société de consommation que les médias martèlent sans cesse. Le bien vivre (le « buen  vivir» ou « sumak kawsai » comme disent les populations indigènes, c’est notamment prôner une meilleure harmonie entre les être humains, avec la nature, c’est vivre en complémentarité plutôt qu’en concurrence.

Quel lien avec nous ? Cette conception de la société fondée sur le bien vivre c’est, en ce qui nous concerne, reconnaître notre coresponsabilité dans le sort des peuples du monde, parce que le pétrole exploité là-bas est consommé ici, le fideicomis n’est pas une simple compensation des pays riches.

En cela le projet YasuniITT est un véritable projet de politique publique qui va bien au-delà du strict aspect environnemental ou de seul inventaire des espèces végétales et animales, je tiens à le dire, il valorise également les aspects culturels, économique et sociaux. Il nous interpelle sur notre mode de vie. Il nous appelle  à inventer une autre forme de mondialisation qui prenne enfin en compte l’intérêt général mondiale.

Ce projet s’appuie sur des mesures concrètes qui permettraient en effet, bien entendu, de préserver cette ressource exceptionnelle de biodiversité, de mettre en place des programmes de lutte contre la déforestation, de mettre en place également, au niveau local, des programmes de développement social, de respecter le droit des peuples indigènes et, enfin, d’engager une véritable transition énergétique permettant de prendre en compte la disparition des ressources de pétrole.

À ce jour, différents pays ont déjà abondé ce fidéicommis. Nous pouvons être encore plus confiants que lors du dépôt de l’amendement budgétaire sur l’abondement du fond au niveau attendu pour Décembre 2011. De nombreuses collectivités territoriales (IDF, PACA, Limousin, Aquitaine…) annoncent également leur soutien à cette démarche et une association, Viva Yasuni, œuvre désormais à la diffusion de ce projet en France. Bref, si l’initiative de notre groupe était inédite en décembre dernier, et je sais qu’elle en a surpris certains, nous pouvons les rassurer et nous réjouir que cette initiative soit aujourd’hui soutenue par un nombre toujours grandissant d’acteurs politiques, associatifs ou citoyens. Commençons dès maintenant à promouvoir le bien vivre !

C’est enfin parce que l’aspiration du peuple équatorien dépasse les frontières du parc Yasuni ITT qu’il nous est proposé également de soutenir les démarches des peuples autochtones inscrits dans ce grand projet de société. Notre collectivité doit œuvrer à ce que les liens entre certains peuples autochtones et la politique nationale de l’Equateur se poursuivent favorablement. Notre soutien doit aussi être un gage de cette confiance réciproque entre élus et citoyens, entre représentants du peuple et le peuple lui-même.

La Ministre de la coordination du patrimoine de l’Équateur, Mme Espinosa, attend, et avec elle de nombreuses populations, un engagement ferme de notre part. Ne la décevons pas !

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