dimanche 20 avril 2014

Tribune Climat : au-delà des objectifs, mener la lutte pour les moyens. Des schémas régionaux climat air énergie à l'Union européenne.

PortraitCorinneMorelDarleuxScreenShot.jpg
Climat : au-delà des objectifs, mener la lutte pour les moyens.

Des schémas régionaux climat air énergie à l'Union européenne.

Tribune de Corinne MOREL DARLEUX, élue régionale et tête de liste aux européennes pour le Front de Gauche


Alors que le GIEC vient de rendre un nouveau rapport alarmant sur le climat, la Région Rhône Alpes a adopté ce 17 avril son Schéma Régional Climat Air Énergie (SRCAE). Celui-ci répond à l’urgence qui nous dicte aujourd’hui de mobiliser tous les acteurs et d'actionner tous les leviers pour mener une lutte efficace contre l’emballement climatique. C’est donc une bonne chose que les Régions mènent un travail prospectif sur des questions qui impacteront de façon conséquente le futur. Un travail qui permet de traiter ces questions dans les temps longs nécessaires, quand on sait qu’ils ne coïncident pas toujours avec la temporalité politique

Une bonne chose également que nous puissions avancer en Régions sur ces questions avec l’ensemble des acteurs dont l’expertise est fondamentale pour intégrer tous les paramètres nécessaires à la décision. Les objectifs chiffrés du SRCAE de Rhône Alpes correspondent d'ailleurs à la volonté du Front de Gauche d’entamer une planification écologique ambitieuse, en capacité de répondre aux défis auxquels notre planète et l’ensemble de ses habitants sont d’ores et déjà confrontés. En 2012, notre groupe Front de Gauche avait émis un certain nombre de réserves aujourd’hui écartées puisque les nouveaux objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour Rhône Alpes ont été révisés à l’échelle 2050 afin d’intégrer le facteur 4, soit une réduction de 75% des émissions.

Ce qui est une moins bonne chose en revanche, c’est qu’entre les politiques d’austérité et la faiblesse des dotations octroyées aux collectivités par l’État, on peut s’interroger sur la capacité que nous aurons dans les années à venir à répondre à ces enjeux et à mettre en place ce que nous nous fixons comme objectifs aujourd’hui.

Comme le conclut le GIEC - même si je suis loin d’en partager toutes les conclusions, notamment en termes d’énergie nucléaire et de stockage du CO2 - « les États doivent lancer une véritable révolution économique pour parvenir à limiter le réchauffement de la planète à 2°C avant la fin du siècle ». La nouvelle ministre Ségolène Royal a beau se dire convaincue que cela est possible, quand on voit que le Gouvernement actuel est en train de brader nos droits acquis de haute lutte aux lobbies industriels dans les négociations sur le TAFTA (Grand Marché Transatlantique), permettez-moi de douter que ces choix là aillent réellement dans le sens de la transition énergétique.

C’est bien de porter des objectifs ambitieux... Encore faut-il ne pas oublier de se battre pour en obtenir les moyens : les Régions n’agissent pas de manière hors sol. Or, le cadre national et européen actuel se révèle très problématique pour la mise en place de mesures intégrant ces objectifs régionaux !

D’un côté, au niveau national, nous sommes toujours dans l’attente d’une grande loi sur la transition énergétique qui devrait confirmer le rôle prépondérant des Régions sur le climat. Mais de l’autre, la loi de décentralisation et les nouvelles mesures d’austérité risquent fort de leur ôter les moyens d’en assumer les conséquences budgétaires. Les dernières annonces du Premier Ministre Valls en la matière ne sont pas de nature à nous rassurer. On le sait, le SRCAE n’est pas opposable aux différents acteurs et dans le même temps, les Régions ne peuvent se substituer à l’État sur le volet des incitations et des aides. Quels sont alors nos leviers d’action véritables ? De même le Contrat Plan État Région (CPER) 2014-2020 laisse présager un engagement financier de l’État très en deçà des objectifs que nous nous fixons, notamment sur la question de la réhabilitation thermique de l’habitat…

Au niveau européen ensuite, nous dénonçons les méthodes utilisées pour la stratégie globale de l’Union européenne en matière climatique, à savoir le recours au marché carbone et le renforcement de la libéralisation du marché de l’énergie. Ces vielles recettes ont prouvé leur inefficacité. Répondre à la crise par plus de finance, de spéculation et de libéralisme, c’est de la folie !

Nous le répétons, pour le Front de Gauche, la transition énergétique passera nécessairement par une modification radicale et profonde de nos modes de production mais aussi de consommation. Le rapport du SRCAE le souligne d'ailleurs lui-même : en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre « il est nécessaire d’envisager des efforts supplémentaires ainsi que des ruptures, non seulement technologiques mais aussi comportementales, organisationnelles, et sociétales ».

Il y a quelques temps, lorsque nous parlions de planification écologique, nous passions pour de dangereux jacobins. Lorsque nous parlions de ‘sobriété’ et de ‘bien vivre’, nous passions pour de doux rêveurs, mais aujourd’hui de plus en plus de villes intègrent des réflexions sur la gratuité dans leurs programmes d’urbanisme et de transports. Au niveau européen en revanche, le Parlement a adopté un paquet climat énergie vidé d’objectifs contraignants différenciés aux niveaux nationaux en matière d’énergies renouvelables. Le Conseil Européen quant à lui persiste dans les mesures de renforcement de la concurrence et de la libéralisation du marché, laisse ouverte la possibilité  d’exploiter les gaz et huiles de schiste et se pare de déclarations d’intention dépourvues d’objectifs en matière d’efficacité énergétique.

Il est temps de secouer cette Europe là ! Avec la conviction et la détermination que la bataille pour atteindre les objectifs pour le climat, l'air et l'énergie, au delà des schémas régionaux, doit aussi se mener à d’autres échelons. Cela fait partie des batailles que nous porterons au sein du Parlement européen !

Haut de page