Alors que s'ouvre le début des discussions en vue de la "conférence des parties" sur le climat (Cop20) à Lima au Pérou, on apprend que l'espionnage d’État a encore franchi un cran. De Copenhague au G20, les négociations sur le climat
sont assimilées à de véritables opérations militaires par les services de Sa Majesté la Reine d'Angleterre "Supporting HMG's Climate Change
Ambitions". Serait-ce la preuve que les gouvernements prennent en réalité assez au sérieux les prévisions alarmistes comme celles des rapports du Giec, dont le dernier vient de sortir ?
Mmmoui... Le hic c'est que leur mobilisation se cantonne à la recherche d'informations sur les pays concurrents, comme dans n'importe quelle négociation commerciale, pour éviter d'avoir à prendre des mesures trop contraignantes pour l'économie, et non pour effectivement réduire les émissions de gaz à effet de serre. Voilà la triste réalité de l'état des négociations inter-gouvernementales, en dépit des déclarations la main sur le cœur des Ministres Fabius et Royal qui en appellent à une mobilisation immédiate et universelle. Difficile de ne pas en sourire - ou en pleurer - quand le même jour leur Président François Hollande fournit, au Canada, un vibrant plaidoyer pour que les entreprises françaises s'investissent plus dans l'extraction des sables bitumineux, cette aberration environnementale. Sérieux... A croire qu'il cherche vraiment à se faire lyncher.
Pendant ce temps, en France, on en est depuis samedi à 14 survols
de sites nucléaire par des drones dont personne ne sait d'où ils
sortent de l'aveu même de Ségolène Royal qui déclare "nous n'avons
aucune piste".
Des pistes en revanche il en existe pour l'abandon du projet du Testet - Sivens. Après que Monsieur Carcenac (PS) ait courageusement abdiqué au Conseil Général du Tarn, ne procédant finalement à aucun vote et renvoyant la responsabilité à l’État, on assiste à un navrant tir croisé avec Jean-Marie le Guen (PS) qui prétend quant à lui sur i-télé que l'Etat ne peut rien (bis repetita).
Faux. Il suffirait que le gouvernement annule la Déclaration d'Utilité Publique, une décision qui répondrait aux multiples conflits d'intérêt qui émaillent le projet et serait en cohérence avec le rapport d'experts commandé par le Ministère. Réunion de sortie de crise à 18h ce soir chez la Ministre Royal qui semble reprendre la main et aller vers l'abandon du projet.
Voilà qui permettrait en outre d'enfin clouer le bec à la FNSEA qui, ragaillardie sans doute par le soutien sans faille du Premier Ministre Valls, déclare de manière totalement
surréaliste que la « retenue d'eau
»serait « créatrice d'une nouvelle zone humide ». Nos yeux pour pleurer aussi. Ils ne se remettent pas du coup des "djihadistes
verts" de Xavier Beulin, FNSEA toujours. Petit montage vidéo de
réactions sur twitter.
Après les hommages rendus ce week end à Rémi Fraisse, vous pouvez toujours occuper symboliquement la zone du Testet et une
commission d'enquête élargie Testet, NDDL, OL Land va être demandée par la députée
Nouvelle Donne Isabelle Attard. D'autant que le terrain des luttes n'en finit pas de s'agrandir, avec une nouvelle ferme-usine signalée en Indre et
Loire et des actions de désobéissance civile
comme celle menée contre Center Parcs dans les Chambaran en Isère, avec comme un parfum de Rousseau dans l'air.
A l'international aussi ça bouge. En Irlande, les mobilisations n'en finissent pas contre la fin de la gratuité de l'eau imposée par la Troïka. En Grèce, c'est le mouvement "Pas
d'intermédiaire" dit "des patates", qui court-circuite la grande distribution et
résiste à Katerini malgré l'interdiction.
Les nouvelles sont moins bonnes au Japon, où la décision de réactiver les deux premiers réacteurs depuis Fukushima est sur le point d'être entérinée. Sur ce sujet j'avais écrit un papier de retour du Japon, où l'on retrouve Monsieur Fabius et son action en faveur de la réouverture du nucléaire au Japon. En Angleterre pas mieux, avec le projet Kidzania où les gamins britanniques seront goinfrés de logos en guise d'éducation. C'est avec ça que se prépare demain…
Bon, l'actualité a de quoi déprimer, mais elle ne doit pas nous faire baisser les bras, ni sombrer
dans la torpeur. Les luttes
qui s'accélèrent, avec leur cortège de drames humains, sociaux et
environnementaux, ne doivent pas détourner notre attention de ce
qui se trame en coulisses, sur le long terme, avec la loi sur la
transition énergétique et la préparation du sommet climat Cop21 à Paris.
Inutile de rappeler à quel point cela est crucial pour la suite de l'aventure humaine sur Terre. Un seul exemple, en matière d'océans : en un siècle le niveau s'est élevé de 19 cm, la température en surface augmente de 0,11°C par décennie, l'acidité en est à +26%. L'élévation des mers pourrait atteindre de + 26 à 82 cm d'ici 2100. On parle d'un monde inédit et violent là. Pas dans mille ans, mais du vivant de nos enfants.
Sur le projet de loi "transition énergétique et croissance verte", un énorme travail a été effectué sous le pilotage de Didier Thévenieau, responsable du pôle Énergie du Parti de Gauche, qui en a publié les premiers volets dans une approche salutaire de décryptage et d'éducation populaire. Disposer des infos, éclairer le débat, argumenter pour que chacun puisse se faire un avis. Pour ceux qui préfèrent le son, je me suis appuyée sur ces travaux et sur le scénario Negawatt, l'actualité et notre projet écosocialiste pour une conférence de 30 minutes à laquelle vous pouvez accéder en podcast ici.
Enfin, sur l'actualité climat et notamment le dernier Conseil européen,
un communiqué de Mathieu Agostini et François Longérinas, ainsi que sur la privatisation et l'austérité incompatibles avec la
transition énergétique ici. Sur le même sujet, en lien avec l'actualité parlementaire sur le budget
2015, l'article de Tatiana Jarzabek. A signaler également, les 15 mesures d'urgence sociales et
écologiques du PG contre l'austérité et le productivisme et un très bon papier sur les partenariats public-privé, dits PPP, ces "boulets que l’Etat
s’accroche au pied", dont 92% vont à trois groupes : Eiffage,
Vinci, Bouygues. A revoir sur le même sujet, "Nous
sommes partout", une excellente parodie de Vinci.
Je serai à la prochaine rencontre de la Coalition de la
"société civile" en vue de la Cop21 le 13 novembre, au titre de la Fondation Copernic et nous interviendrons avec Didier Thévenieau sur le thème "Face au
capitalisme dévastateur, vite l'écosocialisme" lors d'un joli festival
en Ardèche le 22 novembre. Nous serons également en conférence-débat à l'ENS à Paris le 20 novembre sur le climat avec Mathieu Agostini, aux côtés
de Jade Lindgaard (Mediapart) et de Gilles Lemaire (Alternatiba).
Voilà. Quelques exemples pour rester fiers et motivés, que j'avais envie
de partager.
Soutien aux luttes, travail de fond sur nos propositions, veille et
décryptage de l'actualité, approfondissement de l'alternative
écosocialiste : il n'y a pas le choix, on doit tenir tous les bouts. Et on le fait.
