jeudi 23 avril 2009

Meeting du Front de Gauche à Givors, le 22 avril 2009

Pourquoi le Front de Gauche doit-il mener le combat écologique, en pleine crise sociale ?


Mes cher-es camarades, chers amis

Je ne vais pas être très originale pour commencer : moi aussi je suis heureuse d'être là ce soir ! Parce que quand je nous vois dans cette salle, riches de notre diversité, je me dis que l'espoir il est là. De notre côté. Dans cette volonté que nous partageons de nous battre, de résister, et de changer radicalement la société.

Comme vient de le dire René, nous devons placer l'être humain au centre de tout. Et je ne doute pas que Denis Marx, Bernard Augier et Martial Passi nous parlent ce soir avec toute la force de leur engagement de la crise actuelle, des services publics, de l'Union Européenne ou encore du Front de Gauche.

Alors, plutôt que de prendre le risque de répéter nos propos, je vais moi aussi vous parler du capitalisme, de la crise, de l'Union Européenne et du Front de gauche, mais sous un angle un peu différent...

Car ce soir j'ai décidé de vous parler d'écologie.

Pour plusieurs raisons.

D'abord, parce qu'en tant que militante écologiste et altermondialiste et secrétaire nationale du PG au combat écologique, c'est un sujet qui me tient particulièrement à coeur, depuis des années, et c'est le privilège de l'orateur que de choisir son sujet... Mais ce n'est pas que pour me faire plaisir...

C'est aussi parce qu'à 3 jours de l'anniversaire du nuage de Tchernobyl, qui était censé, je vous le rappelle, s'arrêter au poste de douane française... On sait que s'il est bien un domaine qui ne s'arrête à aucune frontière, c'est celui de l'écologie, et l'Europe a un rôle majeur à jouer en la matière.

Enfin, parce qu'on sait tous que la crise sociale fait passer l'urgence écologique au second plan. Cette semaine, par exemple, on a appris que le projet de loi du Grenelle 1, qui devait passer devant l'Assemblée nationale en deuxième lecture, n'était toujours pas programmé avant fin mai...

Alors après tout, est-ce vraiment l'urgence, en pleine déroute sociale, de poursuivre le combat écologique ? Alors que les fermetures d’entreprises et les licenciements se multiplient, que le chômage explose avec 2 chômeurs de plus par minute depuis le début de l'année ?


En fait, la question n'est pas de savoir si on commence par le social ou l'écologie, car les deux urgences ont les mêmes causes, et appellent les mêmes réponses !

Des mesures d'urgence,  bien sûr, comme celles des propositions de loi déposés par nos parlementaires communistes et du Parti de Gauche, avec l'interdiction des licenciements boursiers par exemple. Mais elles exigent aussi des solutions planifiées sur le long terme, dans le cadre d'un programme de transition vers la sortie du capitalisme.

Parce que si on reste dans le court terme, on ne s'en sortira jamais !

On restera dans ce système  productiviste, qui transforme les désirs en besoins pour nous pousser à consommer toujours plus, dans ce système capitaliste, qui transforme tout en marchandise : les individus, leur force de travail, l'eau, l'alimentation, le savoir, l'éducation... Ce système qui évalue l'intérêt de chaque chose, de chaque activité humaine en termes de profit à court terme et non en regardant l'intérêt général.

L'utilité sociale ? L'impact écologique ? Ils passent au second plan. Ce qui est important, c'est combien ça peut rapporter à une poignée de puissants...

On le voit bien, le capitalisme organise d'un même mouvement l'exploitation des individus et celle des eco-systèmes. C'est en quelque sorte la double peine du capitalisme.

Et le résultat de cette idéologie, on le voit malheureusement tous les jours, partout : inégalités sociales en pleine explosion, même dans les pays dits « riches », destruction de la biodiversité, dérèglement climatique, problèmes de santé dus à la pollution...

Ce système vorace transforme le bien commun en marchandise privée, il n'y a plus de limites à la spéculation.

On savait déjà qu'à Madagascar le groupe sud-coréen Daewoo prévoyait de s'accaparer la moitié des terres cultivables de l'île, pour y faire pousser du maïs et de l’huile de palme, qui seront ensuite directement renvoyés en Corée du Sud. Alors que 70% de la population vit en-dessous du seuil de pauvreté et manque des produits agricoles de base !

Ce cas est malheureusement loin d'être isolé. Pas un jour sans que de nouveaux hectares ne soient cédés. Les petites annonces de terres agricoles à vendre passent maintenant dans la presse financière internationale. En effet, avec la débâcle financière, toutes sortes d'acteurs de la finance et de l'agroalimentaire - fonds de retraite, fonds spéculatifs, etc. - abandonnent les marchés dérivés, et considèrent les terres agricoles comme un nouvel actif stratégique.

D'autres le font pour des raisons de sécurité alimentaire, menacée principalement par l'urbanisation galopante et la diminution des ressources en eau, au Proche-Orient, par exemple.

Ces stratégies de "délocalisation agricole" on le voit sont dues à la fois à la folie spéculative, à la crise financière, et au dérèglement climatique. Mêmes causes, mêmes effets...

Imaginez ce que ça veut dire pour les populations locales, qui sont directement menacées par cet accaparement de la terre dont elles dépendent pour vivre ! Et à votre avis, qui va gagner entre les petits paysans et l'agrobusiness qui exploite pour exporter ?

Alors ma première raison pour vous parler d'écologie ce soir, c'est surtout que l'écologie est aussi et avant tout une belle raison de lutter contre le capitalisme et un combat pour une société plus juste et solidaire.

Mais aussi parce que si nous ne menons pas ce combat, personne ne le fera à notre place !

Qui d'autre, aujourd'hui, peut porter une véritable politique écologique et solidaire ?

Chantal Jouano, l'actuelle secrétaire d'Etat à l'Ecologie ? Qui déclare : "Il n 'y a pas de crise écologique aujourd'hui, uniquement une crise financière" ? On le sait, la droite est prête à tout pour sauver le capitalisme et ses intérêts de puissants, au mépris de l’intérêt général... 

Alors qui ? Le PS ? Qui sitôt terminé le congrès de Reims a rangé aux oubliettes ses grandes déclarations vertes et son pôle écologique ?

Les Verts ? Qui s’allient aujourd’hui avec des libéraux prêts à ratifier le traité de Lisbonne, et qui veulent nous faire croire que l’écologie serait au-delà du clivage gauche-droite, compatible avec un capitalisme « réformé » ?

Ce n'est pas sérieux ! Pour nous, être écologiste et appeler au dépassement du capitalisme, c’est simplement une question de cohérence politique. Et cette cohérence, elle passe aussi par le refus de la construction européenne actuelle.

La position du rassemblement Europe Ecologie mené par Daniel Cohn Bendit est à ce sens très contradictoire : il s'appuie sur l'Europe existante, en disant OUI aux Traités actuels, alors que cette Europe organise exactement l'inverse de ce qu'il préconise...

Relocaliser l'économie ? Très bien ! Mais cette Europe organise un marché européen intégré, c'est à dire qui favorise la circulation des marchandises à l'échelle européenne selon la seule loi du marché... Comment va-t-on favoriser les circuits courts si on ne peut pas d’une manière ou d’une autre "pénaliser" les productions plus lointaines ?

Défendre les services publics ? Parfait ! Mais cette Europe organise leur démantèlement systématique...

Alors pour le Front de Gauche, être écologiste, ça va plus loin que les déclarations de bonnes intentions. Cela ne peut passer que par le refus de la construction actuelle de l’Europe.

Cette Europe qui fait reposer sur les collectivités publiques les objectifs de « bon état écologique des eaux », quand dans le même temps elle favorise l’agriculture intensive, première source de pollution des eaux.

Cette Europe qui ne cesse de pousser à la libéralisation des marchés agricoles et soutient l’agriculture productiviste à grands renforts de subventions, au détriment de l’agriculture paysanne.

Cette Europe qui permet que les émissions de CO2 soient « délocalisées » dans les pays du Sud.

Qui certes adopte un plan climat-énergie, mais ne prévoit aucune sanction aux Etats membres qui n’en respecteraient pas les objectifs...

Une fois encore, on veut bien faire des choses pour l’environnement, mais surtout sans entraver la « croissance économique » et la compétitivité... Globalement, si les acteurs agissent c’est bien et on les aide, s’ils veulent faire mieux c’est encore mieux, et s’il ne veulent rien faire... tant pis.

Pour nous, c’est non ! Nous voulons changer d’Europe, pour construire une véritable politique écologique.

Et, mes camarades, aujourd’hui c’est bien à nous, le Front de Gauche, de porter le projet d'une Europe écologique, sociale et solidaire.

Une Europe qui réoriente la politique agricole commune en faveur de l’agriculture paysanne, vivrière, respectueuse de l'environnement, qui permette aux paysans de vivre dignement de leur travail tout en garantissant la souveraineté » alimentaire... et sans OGM ! Cette invention de l'industrie agro alimentaire' qui assujettit les paysans au monopole des multinationales et fait peser des risques inconsidérés sur l'environnement.

Bonne nouvelle d'ailleurs ! Le 14 avril, l'Allemagne a rejoint la Hongrie,l'Autriche, la Grèce, la France et le Luxembourg en refusant le mais génétiquement modifié MON810 comme l'y poussait la commission européenne, plus soucieuse de plaire aux lobbies que de défendre l'intérêt général.

Une Europe sociale, écologique et solidaire, pour nous, ça veut dire aussi l’arrêt immédiat des ouvertures à la concurrence des services publics, contrairement au vote aujourd'hui même de la nouvelle directive de libéralisation de l'énergie, qui prépare l'arrivée accrue de la concurrence du privé dans ce domaine pourtant d'intérêt général !

Une politique énergétique qui prenne en compte à la fois la justice sociale et l'impératif écologique, cela implique pour nous de développer les énergies renouvelables, et de créer un pôle public européen de l'énergie.

Une Europe écologique, sociale et solidaire, c'est enfin la mise en place d’un bouclier douanier aux frontières de l’UE pour à la fois lutter contre le dumping social et prendre en compte l’empreinte écologique, et la mise en place d'une politique ouverte de partenariat avec les pays du Sud, en rupture avec la logique libérale de l’OMC et de l’Europe forteresse.

Pour construire cette Europe écologique, sociale et solidaire, nous disposons  déjà d'un outil : le Front de Gauche.  Et si certains ont fermé la porte, nous maintiendrons jusqu’au bout notre proposition.  Car dans ce contexte historique de crise du capitalisme, nul ne doit manquer à l’appel de l’unité de la gauche antilibérale.

Parce que la planète n’est pas un terrain de jeu pour les plus riches,

Parce que la catastrophe écologique et la crise sociale imposent de lutter contre le capitalisme et de s'opposer à la vision libérale des traités actuels

Parce que l'Europe doit remettre au premier plan l’intérêt général et la notion de bien commun,

Nous devons changer d'Europe et construire ensemble, avec les députés du Front de Gauche, une Europe écologique, sociale et solidaire !

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