Dans la série "on
n'arrête pas le progrès", il y avait un vote en session au
Parlement européen la semaine dernière sur Desertec. L'occasion de me replonger dans les méandres de ce projet pharaonique, initié sous
les auspices du Club de Rome.
Le protocole d'accord signé en juillet 2009 à Munich prévoit d'installer des dizaines de centrales solaires tout au long du désert du Sahara. Montant estimé : 400 milliards d'euros ! Eh oui, rien que ça, et on peut imaginer vu la complexité et le gigantisme du projet, que ce montant devra être réévalué.
La fondation Desertec regroupe des industriels, des banques et des assureurs : Munich Re, Deutsche Bank, Enel, St Gobain, Siemens... Un bel exemple de capitalisme vert prédateur et productiviste. Voire carrément "éco-colonialiste" - quelle horreur, ces néologismes qu'on est obligés d'inventer pour rendre compte des nouvelles folies des hommes ^^
Car non seulement l'électricité produite est majoritairement prévue pour alimenter les pays d'Europe (via le transport par des câbles haute tension sous marins, estimé à 45 à 50 milliards d'euros), mais de toute manière, vu le prix élevé de l'électricité ainsi produite, on peut en effet imaginer que les populations locales n'auront pas les moyens de s'y approvisionner.
Au lieu de se poser la question de la sobriété, ce projet se base sur une hausse croissante des besoins en énergie en Europe. Son objectif est ainsi de couvrir 15% des besoins en Europe en 2025. A l'instar des mécanismes de développement propre (MDP) de Kyoto, et alors que les pays du Nord refusent toujours de reconnaitre la dette climatique, on continue à aller se servir allègrement chez les voisins du Sud, plutôt que de réfléchir à nos propres manière de vivre, de produire et de consommer. Quand ce n'est pas l'uranium ou le pétrole qu'on va exploiter, c'est le soleil.
Ou l'eau. Car figurez-vous que ces centrales consomment beaucoup d'eau. Eh oui. Avouez que dans le désert ça pose question, d'où l'idée géniale d'installer des usines de désalinisation... Qui posent d'autres problèmes, notamment le rejet de saumure qui risque fort de bouleverser les éco-systèmes des littoraux. Mais qui s'en soucie ? Je doute que ça empêche qui que ce soit de dormir chez Siemens ou à la Deutsche Bank...
... P** avec 400 milliards on devrait pouvoir faire d'autres choses, à la fois en terme de co-développement et de transition énergétique, non ?!
Et si on arrêtait deux secondes d'aller piller le Sud pour alimenter le productivisme et la surconsommation énergétique du Nord ? On arrête tout et on réfléchit ?
