mardi 24 mai 2011

De Puerta del Sol à la Bastille : la calle no calla! (6)

A Madrid, le mouvement populaire Democracia Real Ya! ne faiblit pas...

Suite du récit en texte et en images de ma camarade Céline Meneses (voir aussi la déclaration du PG sur les élections de dimanche en Espagne).


22h - Assemblée de stratégie à long terme lundi soir
Aujourd'hui l'assemblée met du temps à commencer. Il y a tellement de points à traiter et de choses à organiser... Or beaucoup organisent ce genre d'événements pour la première fois de leur vie. Toutes et tous prennent la chose avec beaucoup de sérieux et de courage. Mener les débats d'une assemblée de près de 400 personnes, ça ne s'improvise pas. Ici, des cours de modération de débats sont prodigués. Il faut pourtant improviser un peu. Chacun-e encourage l'autre. Et ça marche plutôt bien!

Une question se pose: A quoi servent les groupes de travail/commissions? A faire des propositions à l'Assemblée générale? Ou bien sont-ils juste un espace de débat critique? Où doivent aller les actes écrits des propositions des groupes de travail? De l'avis général, il faut les archiver sur internet. Reste à les transmettre à la bonne commission pour qu'ils aillent sur la bonne page web... On écrit l'Histoire! Mais le faire tous ensemble quand on est des milliers, c'est pas simple!

Aujourd'hui on travaille sur la démocratie participative, les assemblées de quartier et l'assemblée générale.
-Un jeune homme explique: "Les représentant-e-s (mandat impératif) des assemblées de quartier portent les propositions adoptées par celles-ci à l'assemblée générale. Et c'est cette dernière qui décide".
-"On peut faire autrement, dit un autre: c'est aux assemblées de quartier de prendre des décisions sur les propositions de l'assemblée générale".
-"Les questions propres à chaque quartier doivent être discutées et votées dans ce quartier; les questions générales, qui sont commune à tous les quartiers et relèvent de l'intérêt général, doivent être discutées et votées en assemblée générale" insiste un dernier.
-"Bon alors, s'exclame un autre, il nous manque juste une coordination des assemblées pour travailler les ordres du jour de l'assemblée générale, c'est tout!"

Ces deux dernières propositions ont emporté le consensus après deux longues heures de débats entre confusion, exaspération, sérieux et éclats de rires.

Construire la démocratie réelle, se réapproprier les outils citoyens... C'est pas de la tarte!!!!!

23h - Prise de parole libre sur la fontaine de la place de la Puerta del Sol
Les repas vont être servis. Mais sur la fontaine où un mégaphone est toujours disponible pour qui veut, une foule impressionnante.

Qui parle?

-Un adolescent qui s'exclame: "on est face à un truc très grand! Vous vous rendez compte de ce qu'on est en train de faire?"

-Un cinquantenaire qui tremble en évoquant la guerre civile et la résistance contre Franco."Jeunesse vaillante, libérez la patrie des nouveaux dictateurs!" s'exclame-t-il au bord des larmes.

-Un jeune homme, ému, qui déclare d'un air presqu'absent tant il semble absorbé à contempler la foule: "J'en ai la chair de poule. Depuis que j'ai une conscience sociale, j'ai toujours rêvé de ça! Continuons et changeons le système pour de vrai, mais pour de vrai"

-Une jeune femme qui appelle la foule à "inviter tout le monde à participer au mouvement"

-Un jeune qui nous explique: "je ne suis presque jamais allé voter et depuis que je suis ici je n'ai pas raté une seule occasion de le faire, parce qu'ici ma voix compte. Voter, voter et encore voter, voter tous les jours s'il le faut, voilà ce que je veux faire!"

-Une jeune femme qui a écrit son texte parce qu'elle a peur de ne pas réussir à parler. "Certains nous disent que ce qu'on fait ne sert à rien. Moi ce que je sais, c'est que cette flamme qui s'est allumée dans chacun d'entre nous, personne ne pourra plus l'éteindre!" Lit-elle avec une force et une tendresse immenses

-Un musicien argentin qui vient témoigner au nom des piqueteros de 2001. "Nous, on a pas su continuer. Faites-le!" crie-t-il avant de nous chanter un tango a capella. Un grand moment d'émotion.

Minuit arrive. Comme chaque jour sur la place, on respecte la minute de silence pour les camarades qui ont été arrêtés dimanche dernier. Le silence se fait sur la place. Les douze coups de minuit résonnent au milieu du bruissement des mains qui s'agitent en signe de soutien selon le code adopté. Impressionnant de solennité. Et puis d'un coup, le signal est donné. La minute de silence est terminée.

La foule applaudit à l'unisson en criant "el pueblo unido jamas sera vencido". Tout le monde a les larmes aux yeux...

Haut de page