dimanche 9 décembre 2012

Un samedi d'hiver sur l'écosocialisme... Qui a dit que la politique n'intéressait plus les citoyens ?

assises_jlm_cmd.jpgEh bien. Une semaine aura été nécessaire pour me remettre des semaines de préparation acharnées avec mon camarade Mathieu Agostini et de la (joyeuse et intense) tension des Assises pour l'écosocialisme qui se sont tenues le 1er décembre dernier. Résultat, une grande fatigue et une côte déplacée ;) mais de l'accord général les Assises pour l'écosocialisme ont été un véritable succès. Merci à tou-te-s les camarades qui s'y sont investi-e-s ! Un vrai bonheur militant et un joli cadeau pour les 4 ans du PG que cette journée singulièrement riche. Plus d'une vingtaine d'intervenants, une assemblée de 400 personnes - étonnamment studieuse et attentive, même après plusieurs heures d'échanges, plusieurs milliers de vues via la retransmission en direct et grâce au relais de nos blogueurs (*). Au final, comme en témoigne l'avalanche de messages de remerciements, nous avons touché un public bien plus large que nos seuls rangs ! Et ce, un samedi d'hiver sur l'écosocialisme... Qui a dit que la politique n'intéressait plus les citoyens ?

assises_public_susan_george.jpgNous avons démontré au contraire une fois de plus que le débat politique peut (et doit) être un grand moment d'éducation populaire, capable de rassembler largement, et qu'une alternative à gauche est possible autour d'un nouveau paradigme. Dans la salle étaient présents nos partenaires du Front de Gauche mais aussi des représentants d'Europe Écologie les Verts et de nombreuses associations et revues. Tous réunis pour débattre d'un même combat anticapitaliste, d'un même espoir en un autre projet de société et en une gauche radicale, déterminée à gouverner sur ces bases. Socialisme, écologie et république, planification écologique et règle verte... L'écosocialisme combine un socialisme débarrassé du productivisme et une écologie politique qui refuse l'impasse libérale. Avec lui, nous dessinons les contours d'un projet du buen vivir et du progrès humain qui cite aussi bien Gorz, Marx et Jaurès. Le voilà, le changement ! Celui d'une gauche qui réfléchit, qui refuse la résignation, pense et agit en termes de justice sociale et écologique.


assises_jlm_ec_village_militant.jpg
Face à ce succès et à cet appétit militant, nous avons décidé de faire des Assises pour l'écosocialisme un processus permanent. Le site dédié va continuer à accueillir les nombreuses contributions, un comité des Assises va être mis en place, et le Manifeste « 18 thèses pour l'écosocialisme » sera finalisé dans ce cadre. Déjà, des Assises décentralisées et unitaires s'organisent à Nice, Marseille, Toulouse, dans le Rhône, Doubs, Puy de Dôme, Languedoc Roussillon... 

Pour finir, voici le texte de mon intervention en ouverture des Assises pour l'écosocialisme, ci-après et ici en téléchargement PDF.

assises_public_salle.jpgVous pouvez aussi retrouver l'intégralité des débats en vidéo .

L'avenir est à nous camarades. Et il se dessine en rouge et vert :)


(*) Notre équipe de blogueurs était sur place, vous pouvez lire leurs récits sur l'excellent Gauche de Combat là, le non moins éclatant A Gauche Pour de Vrai ici  mais aussi chez l'inénarrable Des Pas Perdus le camarade L'étang moderne ici et d'autres à découvrir au gré des liens... (et un grand merci à nos photographes Rémy Blang, Michel Soudais et Stéphane Burlot - cliquez les pour retrouver toutes leurs photos des Assises).


assises_cmd_tribune.jpgUn nouveau projet politique « creuset » pour sortir de la crise et construire un monde meilleur

Corinne MOREL DARLEUX

Assises pour l'écosocialisme - 1er décembre 2012

Chers amis, chers camarades, citoyennes et citoyens,

Je suis particulièrement fière et heureuse de vous accueillir à ces premières Assises pour l'écosocialisme. Je sais, c'est une phrase bateau... Et pourtant, elle a rarement été aussi vraie.

Je voudrais tout d'abord saluer tous les camarades qui ont rendu cette journée possible, les associations et revues alternatives qui ont répondu présentes sur le village militant, avec un salut spécial à nos amis de l'Acipa bien entendu retenus sur place pour poursuivre la résistance à Notre Dame des Landes, les intervenants et animateurs, bien sûr, Monsieur le ministre d'Equateur René Ramirez, les élus, salariés en lutte, responsables syndicaux et représentants de partis politiques qui nous font le plaisir de leur présence : PCF, GA, Fase, Alternatifs, Alternatifs, C&A, PPLD, MOC et EELV.

C'est un moment politique important que cette journée autour de l'écosocialisme, à plusieurs titres. D'abord, parce qui s'agit rien moins que de construire une nouvelle synthèse politique à gauche entre socialisme et écologie politique. Il ne s'agit certes pas de réinventer ce courant de pensée et nous sommes d'ailleurs fiers d'en accueillir aujourd'hui plusieurs représentants de marque, comme Michael Lowy. Mais l'apparition d'un nouveau paradigme écologiste, d'une nouvelle prise de conscience au-delà des réseaux militants - prise de conscience à laquelle la campagne du Front de Gauche avec JL Mélenchon a je crois contribué avec notamment notre programme de planification écologique, la règle verte, et le lien avec les salarié-e-s en lutte et la révolution citoyenne - tout cela lui donne aujourd'hui un nouveau relief.

Et hélas le contexte politique français, européen et international lui donne également une nouvelle urgence. Nous sommes dans un contexte de crises multiples et d’urgence écologique provoquées par une même cause : la recherche de profits qui prime sur le reste, une économie du « produire pour produire » qui en oublie les besoins humains. En trois mots, le capitalisme, le productivisme et la mondialisation financière. Alors certes, nous sommes anticapitalistes, antilibéraux et antiproductivistes, ce point est acquis. Mais aujourd'hui nous ne pouvons pas à gauche nous contenter de nous indigner et d'être dans l' « anti ». Nous avons besoin d'un projet qui donne à voir une société de progrès humain et de bien vivre, un projet « creuset » qui combine le meilleur des traditions de la gauche ouvrière, républicaine, sociale et écologiste, pour renouer avec une gauche d'espoir, une gauche qui donne envie et remette au goût du jour les jours heureux.

Ils semblent hélas bien loin aujourd'hui. Exploités, opprimés, tenus à l'écart des décisions qui les concernent directement, nos concitoyens n'en peuvent plus. La colère monte au sein d'une société où le « vivre ensemble » se délite dans ce que Jacques Généreux a appelé la « dissociété ». Ses ressorts, nous les connaissons : le consumérisme élevant l'accumulation matérielle au rang de loi à grands coups de publicité et générant des besoins jamais rassasiés ; le creusement des inégalités sociales produisant souffrance et frustrations ; le productivisme épuisant les ressources naturelles ; la mondialisation à l 'œuvre, libérale et liberticide ; la course à la baisse des coûts de main d’œuvre pour répondre à la pression actionnariale, le dumping social et environnemental et la délocalisation des émissions de gaz à effet de serre. La planète est essorée, les peuples grondent : contre l'oligarchie, les puissants, la finance, l'Europe libérale ; parfois contre le climat, la pollution, le nucléaire, les gaz de schiste, le bétonnage des terres agricoles ; partout contre les conditions de travail, le chômage, les fins de mois qui arrivent de plus en plus tôt, la difficulté à se loger et une certaine « classe politique » qui les méprise. Ceux là même qui nous expliquent à longueur de colonnes et d'ondes radios qu'il n'y a pas le choix, pas d'alternative, qu'il va falloir se serrer la ceinture, que chacun fasse des efforts.

Alors c'est à nous de mener la bataille culturelle pour « décoloniser l'imaginaire », de montrer que l'alternative existe, qu'elle se dessine en rouge et vert, et qu'on sait comment la mettre en œuvre. A nous, oui, parce que cette alternative ne viendra pas du gouvernement ! Même ceux qui y croyaient encore se rendent aujourd'hui compte que ce gouvernement qui se dit « socialiste » et « écologiste » ne met en réalité en œuvre ni l'un, ni l'autre. On le voit chaque jour, de Florange à Notre Dame des Landes en passant par le traité de l'austérité, nous sommes bien loin d'un programme écosocialiste qui permettrait d'entrevoir la sortie de crise et les contours d'une société plus juste, fraternelle et solidaire. Dans ce contexte, le Parti de Gauche avec le Front de Gauche se dresse comme la principale force politique porteuse d'un projet alternatif au capitalisme et au productivisme. Alors oui, 4 ans après la création du PG presque jour pour jour, alors que nous rejoignent de plus en plus au sein du Front de Gauche d'écologistes et de nouvelles forces que je salue au passage, comme la GA et les Alternatifs, il est plus que jamais nécessaire d'approfondir et d'élargir nos convergences. A l'heure où trop de politiques hélas confondent leur gauche et leur droite, dans un contexte de crise de légitimité des partis et de l'action politique, il est urgent de montrer qu'il existe une gauche forte, qui ne se résigne pas, capable de rassembler sur un projet de société radicalement différent.

L'écosocialisme propose un nouveau modèle d'émancipation combinant république sociale et impératif écologique, il est le projet sur lequel une alternative peut se construire, en tirant les leçons des erreurs du passé : le productivisme de la gauche traditionnelle, et la vision libérale de l'écologie, celle de ceux qui préfèrent culpabiliser les individus pour éviter le vrai débat : celui de la responsabilité du mode de production capitaliste. Car contrairement à ce que disent les socio-libéraux, nous, nous savons qu'il n'y a pas lieu d'attendre une hypothétique relance de la croissance pour redistribuer les richesses : ces richesses existent, il faut juste avoir le courage politique d'aller les prendre dans les poches du capital pour les remettre au service des besoins humains et de l'intérêt général. Nous savons aussi aujourd'hui qu'une croissance infinie dans un monde fini est un suicide civilisationnel qui menace les conditions mêmes de la vie humaine sur Terre.

Face à ces enjeux, l'écologie ne peut se contenter d'accompagner le système en se souciant uniquement d'en aménager les dégâts les plus visibles sur l'environnement ; elle ne peut faire l'économie d'une critique radicale, en profondeur, du système économique et de ses rouages mondiaux. Notre écologie à nous est sociale, elle est liée aux combats historiques de la gauche. Elle fait la démonstration qu'il existe un seul écosystème, bien commun de l'humanité, et donc un intérêt général à le préserver. Elle s'appelle écosocialisme. Elle permet d'aborder les problèmes politiques contemporains avec une vision systémique, à la fois sur les questions d'environnement et d'écologie, mais aussi de modèle industriel, économique, et de démocratie. La lutte des Fralib est à cet égard exemplaire, qui combine tout à la fois reprise sous forme coopérative et principes d'autogestion, et relocalisation de l'approvisionnement en produits issus d'une agriculture respecteuse de l'environnement. Voilà un bel exemple de lutte écosocialiste ! A nous de nous faire les porteurs de ce projet, seul à même de faire face aux nouveaux défis en permettant la jonction des grands courants de la gauche dans un nouveau paradigme politique.

Pour cela, nous l'avons décliné en 18 thèses, dans la lignée du Manifeste international de l'écosocialisme publié en 2002 et de la déclaration écosocialiste de Belem de 2009, pour ouvrir la voie à un nouveau projet politique, nous soumettons au débat ce projet de manifeste des assises pour l'écosocialisme que vont venir alimenter les échanges de cette journée. Journée dense, que nous avons voulu ouverte à tous les débats qui traversent la gauche qui réfléchit, celle qui veut sortir de la crise, inventer de nouvelles voies de rupture, et qui est prête à gouverner sur ces bases ! Il y sera question de souveraineté populaire et de sixième république, de services publics et d'implication des usagers, de lutte contre le consumérisme, de désobéissance civique, de transition énergétique et de relocalisation de la production, d'alternatives concrètes, de coopératives, de luttes sociales, d'internationalisme et de buen vivir. Et parce que nous n'avons pas peur des mots, nous parlerons aussi appropriation des moyens de production et nationalisation, objection de croissance, revenu maximum autorisé et extension de la gratuité, désobéissance européenne et démondialisation.

On y citera Gorz, Marx et Jaurès… Mais permettez qu'avant je cite un poète, Pablo Neruda, qui écrivait en 1974 : "Je veux que l'immense majorité, la seule majorité : tout le monde, puisse parler, lire, écouter, s'épanouir. Je n'ai jamais compris la lutte autrement que comme un moyen d'en finir avec la rigueur. J'ai pris un chemin car je crois que ce chemin nous conduit tous à cette aménité permanente. Je combats pour cette bonté générale, multipliée, inépuisable.

Aujourd'hui, en 2012, c'est à nous ! Ni avant-garde éclairée, ni dictature verte, ni repli, notre voie st celle de la révolution citoyenne dont les prémices, comme chez nos compagnons d'Amérique latine, s'amplifient de jour en jour. Si nous ne voulons pas que le désespoir et la colère ne basculent du côté de la haine, à nous de faire d'urgence fleurir la révolution écosocialiste dont nous semons les graines depuis tant d'années.

Camarades, chers amis, Vive l'écologie, vive la sociale, vive l'écosocialisme !

Haut de page