samedi 19 avril 2014

Récit de Fukuchinon (invité du blog)

Par Dimitri Robert – Militant membre de la commission écologie du Parti de Gauche à Chinon (Indre et Loire)

Fukuchinon, c’est le nom du rassemblement festif organisé ce 12 avril 2014 par le réseau Sortir du nucléaire dans le but d’engager un débat sur la nécessité de sortir du nucléaire et de s’engager dès aujourd’hui sur les pistes évitant le retour à la bougie une fois les réacteurs arrêtés (économies d’énergies, énergies renouvelables, éco-construction). Fukuchinon est donc un village des alternatives installé sur le boulodrome de Chinon sur les rives de la Vienne, où le visiteur peut s’informer sur les éoliennes, les toitures solaires, la construction en bois et paille avec le projet Paligloo, les cuiseurs solaires, et même un prototype de vélo d’appartement relié à une machine à laver. On y trouve également des stands de collectifs et d’associations (Sortir du nucléaire, association de contrôle de la radioactivité de l’ouest, NDDL37, Greenpeace, etc.), de partis politiques (le Parti de Gauche et EELV) ainsi que des stands pour se sustenter avec de bons produits locaux et biologiques.

fukuchinon1.jpgLe Parti de Gauche, de par son engagement écosocialiste, prône une transition vers des énergies respectueuses de l’humain comme de son environnement en tous endroits de la planète. Nous voulons la sortie du nucléaire par les économies d’énergie, le développement d'énergies alternatives et non polluantes et la création massive d’emplois pérennes dans ces secteurs d’avenir. Nous avons donc soutenu cette initiative du réseau Sortir du nucléaire et participé activement à son organisation (remerciements particuliers au Parti de Gauche Touraine).

Sur notre stand, nous présentions Corinne Morel-Darleux au travers d’une exposition sur son voyage récent au Japon et notamment à Fukushima. Corinne Morel Darleux est la candidate tête de liste du Front de Gauche aux élections européennes sur la circonscription Massif Central-Centre, et secrétaire nationale à l'écosocialisme du Parti de Gauche.

Des animations ont eu lieu pour éveiller la conscience des plus jeunes (contes musicaux, jeu sur la transition énergétique), ainsi que plusieurs conférences pour aborder la transition énergétique (et donc la fermeture des centrales) et plus particulièrement en région Centre (par l’association Virage énergie Centre), particulièrement pourvue en réacteurs. On ne peut que regretter par contre que la conférence sur les transports nucléaires ait dû être annulée du fait du retard pris suite aux multiples contrôles policiers subis par les conférenciers.

Bien que ce rassemblement se voulût festif, militant et dans le but de trouver des solutions positives à l’avenir, la préfecture d’Indre-et-Loire avait décidé de « mettre les moyens » pour éviter tout débordement, brandissant la menace de la venue de hordes de casseurs.

Pendant les deux semaines précédant Fukuchinon s’est installée une véritable psychose auprès des habitants de Chinon, peu habitués à voir des manifestations dans leurs rues. La presse locale a amplifié les chiffres que nous, organisateurs, espérions et il était impossible de se promener dans les rues de Chinon sans entendre parler de Fukuchinon et des casseurs qui allaient venir. L’hôpital de Chinon a démesurément mobilisé son personnel suite à l’annonce de la venue de 8000 manifestants (soit peu ou prou la population de Chinon). Les commerçants du centre-ville ont été invités à être très prudents, voire à ne pas ouvrir. Malheureusement, beaucoup ont suivi ce conseil.

Cela s’est traduit par une ville en état de siège, avec la présence des CRS (entre 600 et 700 selon les sources, dont certains venaient de Pau) concentrés dans le centre de Chinon, des contrôles de gendarmerie sur toutes les voies d’accès à la ville, un hélicoptère, la brigade fluviale, des personnes contrôlées plusieurs fois avec fouille des véhicules et même confiscation de deux banderoles (car pourvues de montants de bois !). La manifestation s’est élancée vers 14h15 sous une certaine tension du fait de l’encadrement du cortège par les CRS et leurs grilles qui empêchaient tout contact visuel avec les habitants se trouvant de l’autre côté. Elle s’est achevée sans le moindre incident au bout d’une heure et demie.

fukuchinon2.jpgSoulagement, surtout après la réussite de cette journée et ses quelques 1250 visiteurs de tous âges : saluons les bébés (et leurs parents) qui ont pris part au défilé, réjouissons-nous de la diversité générationnelle des visiteurs préoccupés par notre avenir. Mais amertume aussi car le véritable danger dont voulaient se prémunir les autorités était probablement le dialogue avec les habitants, d’où cet isolement du défilé comme du village des alternatives.

Pour expliquer cela, il faut connaître le contexte économique de la région de Chinon qui repose essentiellement sur le nucléaire et le vin, le premier étant ici particulièrement entouré de tabou. Pratiquement chaque habitant a au moins un membre de sa famille qui travaille ou a travaillé à la centrale.

Le but de cette journée était donc d’inviter les travailleurs et retraités de la centrale, qu’ils soient pour ou contre le nucléaire, afin de discuter le plus sereinement possible des nombreux problèmes posés par le nucléaire (extraction du minerai, sous-traitance et négligences mettant en péril la sûreté des installations, des travailleurs et des populations, dangerosité des déchets, gouffre financier engendré par la prolongation de la durée de vie des réacteurs) et les solutions pour s’en passer tout en conservant un accès à l'électricité pour chaque citoyen de ce pays.

Le dialogue va se poursuivre, et nous espérons organiser d'autres rencontres sur ce thème, rassemblant associations et syndicats, avec Corinne Morel Darleux, qui ce jour-là marchait à Paris avec l'Opposition de Gauche contre la politique gouvernementale, dans le cadre de la campagne européennes.

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