mercredi 11 juin 2014

Transition énergétique : Ira, ira pas ? Tour d'horizon et rappel des positions du PG

eeigbgfj.pngTransition énergétique : Ira, ira pas ?

La grande loi sur la transition énergétique promise la main sur le cœur par François Hollande dès septembre 2012, à l'occasion de la première conférence environnementale du gouvernement, est devenue le grand marronnier politique du quinquennat de Hollande placé sous le triptyque « Austérité , voracité, ébriété ». Après avoir été promise, repoussée, repromise et redécalée, la loi va donc finalement être présentée en Conseil des Ministres par la Ministre Royal mercredi 18 juin prochain, pour un objectif d'adoption au Parlement à l'automne 2014. Ensuite... Il faudra encore attendre les décrets d'application. Pour rappel en 2010 l’article 3 de la loi Grenelle 2 rendait obligatoires les travaux d'amélioration de la performance énergétique dans les bâtiments tertiaires à partir de 2020. Le décret d’application n’a toujours pas été publié...

Illustration : d, La fabrique à nuages

Pour mémoire, cette première conférence environnementale avait occasionné un rassemblement devant le Palais d'Iéna où nous étions avec plusieurs associations et ONG et avait déjà donné lieu à un décryptage désabusé de notre part.

Cette loi qui arrive enfin est censée s'inscrire dans la foulée du Débat national sur la transition énergétique (DNTE) lancé en novembre 2012 et auquel nous avons contribué en juin 2013, par le biais d'un cahier d'acteurs du Parti de Gauche sur un thème ignoré, la sous-traitance dans le nucléaire. Las, malgré ce lancement en grande pompe, en septembre 2013 avait lieu la deuxième conférence environnementale, sans grandes avancées sur le climat et qui ressemblait furieusement, entre pédalo et rétropédalage, à du sur-place gouvernemental.

Huit grands enjeux qui diront l'ambition – ou pas – de la loi

La journaliste Jade Lindgaard a fait un excellent tour d'horizon à la fois complet et succinct des enjeux de ce projet de loi sur Mediapart, sous la forme de huit points clés qui diront l'ambition – ou pas – de cette loi qui doit faire face à deux obstacles majeurs : le poids des lobbies de l'énergie et des banques (notamment pour les tiers financeurs) et le plan drastique d'austérité du gouvernement, qui risque d'en handicaper sérieusement l'ambition et la mise en œuvre. Jade Lindgaard rappelle d'ailleurs que cette loi ne comportera pas de mesures fiscales, celles-ci étant réservées à la loi de finances. Il existe pourtant des possibilités, pour peu qu'on en ait la volonté, de financer la transition énergétique.

Sur ces huits points clés, en voici mon résumé subjectif, l'article intégral sur Mediapart est ici.

  • En matière de nucléaire, l'objectif de ramener à 50 % la part du nucléaire à l’horizon 2025 devrait figurer dans le texte – ce qui signifie, à consommation égale, qu'il faudrait fermer « une vingtaine de réacteurs ». Deux possibilités pour s'en donner les moyens et respecter l'engagement du Président de la République de fermer Fessenheim : y inclure un article redonnant la prérogative au gouvernement de décider de fermer une centrale, prérogative perdue en 2006 par la loi TSN, ou un article plafonnant la puissance nucléaire installée à son niveau actuel, environ 63 300 mégawatts. Problème pour le gouvernement : dans ce cas, si Fessenheim ne ferme pas, du coup l'EPR ne peut pas démarrer.
  • Concernant les énergies renouvelables : l'objectif à horizon 2030 est de 32 % de la consommation à partir d'énergies renouvelables (40 % pour l’électricité et 15 % pour le carburant). Rappelons que la France est actuellement à 16%, que le paquet énergie climat au niveau européen prévoit 27% et que les ONG demandent 45%. Le risque pervers d'un objectif ambitieux serait d'ouvrir la porte aux agrocarburants. La loi va devoir également décider du maintien ou non de l'obligation d'achat des énergies renouvelables (éolien, photovoltaïque, biomasse…) à un tarif préférentiel, avec l'hypothèse de création d’une nouvelle aide en « complément de rémunération », versé en plus de la vente.
  • Au-delà de ces aspects « production », du côté des économies d'énergie, la loi devrait fixer des objectifs à court et moyen terme de baisse de la consommation d'énergie. François Hollande à la Conférence environnementale de 2013 avait annoncé une réduction de 50 % de la consommation d’ici 2050 et une baisse de 30 % de la consommation de combustibles fossiles d’ici 2030. Sans toutefois en préciser les étapes ni les moyens...
  • Un des principaux leviers de ces économies est la rénovation thermique. Sur ce plan, la France a pris un retard énorme, puisqu'en 2013 seulement 160 000 logements ont été renovés, pour un objectif officiel de 500 000 d’ici 2017. Y aura-t-il dans la loi instauration d’une obligation de travaux à l'occasion de grosses opérations type réfection de toiture ou ravalement, ou lors de la vente ? Ou privilégiera-t-elle l'incitation via l'extinction du prêt à taux zéro sur les travaux de rénovation au bout d'une période donnée ?
  • En matière de fiscalité et de lutte contre la précarité, la loi arrive dans un contexte de hausse du coût de l'énergie aggravé par la contribution climat énergie (CCE) adoptée en 2013, qui sera dans un premier temps plus favorable aux entreprises qu'aux ménages défavorisés. Y aura-t-il compensation sous la forme d’un chèque énergie ? Sachant que le gouvernement prétend avoir déjà compensé via l’extension des tarifs sociaux du gaz à 4 millions de ménages (loi Brottes) et la baisse à 5 % de la TVA sur les travaux de rénovation énergétique...
  • Enfin, autre levier, autre obstacle : le tiers financement, c’est-à-dire le fait de faire payer le coût des travaux de rénovation dans un logement par les économies de chauffage qu’ils permettent, est bloqué par les banques. Des sociétés d’économie mixte régionales (opérateurs de tiers financement ) ont en effet été créées, comme en Rhône Alpes, mais se heurtent au monopole bancaire sur le crédit, garanti par le code monétaire et financier.

Vers la planification écologique ?

Selon Arnaud Gossement, qui a également décortiqué les éléments connus du projet de loi, celui-ci devrait « soit créer, soit modifier le régime de 9 instruments de planification énergie et climat. De très nombreuses mesures sont consacrés à cet exercice de planification qui est au centre du texte ». Nous regarderons attentivement ces dispositifs au regard de la proposition de loi que nous avons nous-mêmes déposée sur la planification écologique.

La transition en débat cet été

Comme nous l'avions fait dès la Fête de l'Huma en septembre 2012, juste avant la première conférence environnementale, le PG va organiser un débat sur le projet de loi et ce qu'il conviendrait de faire en matière de transition énergétique lors des ses journées d'été « remue-méninges » à Grenoble. Nous y inviterons des experts et observateurs avertis, je vous en reparlerai.

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